Nus et sujets libres










Rembrandt s'est intéressé très tôt au nu féminin. Très éloigné de l'idéal académique, il recherche avant tout une représentation de la réalité. Il a souvent choqué et André Pels en 1681 s'offusque : « Au lieu de prendre pour modèle la Vénus grecque, il a été chercher une blanchisseuse ou une fouleuse de tourbe. Oui ! des seins flasques, des mains déformées, voire même les plis du corsage autour des reins et ceux des jarretières sur la jambe, il copia tout ! ». Si, comme le dit plus modérément Sandrart, « il lutta contre les académies et s'en tint à la nature », il a su plus tard, dans sa maturité, emprunter à celle-ci son pouvoir de suggestion et déceler toutes ses ressources esthétiques. L'artiste use du clair-obscur pour faire surgir de l'ombre un corps de lumière, au mépris des contours précis, ou encore il fait filtrer la lumière à travers les tailles d'ombre et sculpte mystérieusement un nu sans contours dans l'épaisse pénombre.
Les nus, les sujets libres comme les scènes mythologiques occupent néanmoins peu de place dans l'œuvre gravé de Rembrandt.
La Négresse couchée
1er état
Le titre a été donné pour la première fois par Bartsch en 1797 mais il ne s'agit pas d'une négresse. Dans le catalogue de la collection d'Amédée de Burgy en 1755, ce nu est intitulé Femme dormant nue, les fesses au vent (n° 550). La confusion vient du modelé rendu par l'ombre et non par la lumière. Le corps, dessiné par un réseau très dense de tailles plus ou moins serrées et profondes qui filtrent une lumière très subtile, émerge de l'obscurité. Les formes s'imposent sans contours, par des volumes animés de clarté diffuse. Les trois procédés, eau-forte, pointe sèche et burin, sont indissociables et se fondent étroitement. Cette manière rigoureuse, très élaborée, contraste avec la liberté graphique des linges clairs du lit. La qualité des épreuves varie selon l'encrage et l'essuyage, essentiels dans cette estampe pour sculpter la musculature et suggérer la mouvance des chairs souples et fermes selon la luminosité. La comparaison des épreuves des trois états exposés met en évidence ces effets.
Rembrandt a réalisé là un nu féminin d'un modernisme étonnant, dont Delacroix s'inspira pour l'estampe Étude de femme vue de dos en 1833.
Bibliothèque nationale de France
Diane au bain
Rembrandt grava deux nus isolés assis en 1631, Diane au bain et Femme nue assise sur une butte. Un troisième nu couché est représenté dans une scène mythologique, Jupiter et Antiope. Bien qu'identifiée comme un nu, Diane au bain, d'après sa pose, est aussi une figure mythologique. La déesse qui devait cacher son corps aux humains le détourne, tout en regardant le spectateur. Elle est figurée avec son attribut, le carquois rempli de flèches, assise sur une chemise brodée, les bras appuyés sur une veste d'homme moirée ornée de luxueuses broderies. Les sujets mythologiques sont rares dans l'œuvre du maître à cette époque, et cette femme nue est plus proche de la « fouleuse de tourbe » que de la déesse. Est-ce par humour que l'artiste a gravé ce carquois ou en hommage à la réalité de la nature ?
La datation a été établie par comparaison stylistique avec un dessin, Vieil homme assis, daté de 1630, conservé à Berlin. Un dessin préparatoire à la gravure exécuté à la pierre noire avec quelques légères touches de lavis (British Museum, Londres) est considéré comme la plus ancienne étude de nu conservée de Rembrandt. Il l'utilisa comme un poncif pour tracer la figure sur le cuivre, repassant les contours vigoureusement. L'estampe diffère peu du dessin dans son aspect général. Cependant le nu est moins spontané. Le modelé très élaboré et le fond de feuillage très détaillé alourdissent l'ensemble. La simplification des formes modelées par la lumière sculptant le corps librement esquissé a fait place dans l'estampe à une figure figée et à une lumière plus violente. Les maladresses, notamment dans la représentation des membres inférieurs, se remarquent davantage. L'artiste a dessiné le bras gauche dans deux positions différentes : il va préférer celle du bras appuyé et relevé pour le bras droit dans la gravure, en contrepartie par rapport au dessin.
Bien que cette estampe soit proche de la Femme nue assise sur une butte, si l'on se reporte au dessin, on peut s'interroger sur la totale exécution de la gravure par Rembrandt, et envisager la participation d'un élève.
Une peinture, Suzanne et les vieillards de Jan van Neck, à Copenhague, une autre, conservée dans une collection privée, et la copie de la tête de Diane attribuée à Lievens ou à Dou, furent exécutées d'après cette œuvre.
Bibliothèque nationale de France
Femme au bain
1er état
Avant que le bonnet ne soit baissé et arrondi en forme de turban au 2e état.
Impression sur japon comme la plupart des autres épreuves, avec un effet d'encrage sur tout le fond et sur les parties ombrées des bras et de la jambe droite.
Rembrandt grava trois nus en 1958. Celui-ci est intitulé La Concubine de Rembrandt dans l'inventaire de Jonghe en 1679, « Une des deux femmes nues posant » dans l'inventaire de Röver (mort en 1739), La Fiancée juive dans le catalogue de vente de A. de Burgy en 1755.
La femme au bain pose en atelier, assise sur une chaise, la tête tournée vers un chapeau d'homme posé à ses côtés. Le cercle lumineux à droite donne de la profondeur à l'espace, tout comme la signature de Rembrandt, cette fois encadrée. L'éclairage, bien que très artificiel, semble venir en diagonale du haut de l'estampe. Les tailles plus ou moins profondes et espacées modulent l'ombre et laissent filtrer la lumière. Leur direction est dans le même sens que la diagonale qui partage la composition et qui longe le bras tendu de la femme, la tête penchée de profil ainsi que l'orientation de son regard : ses yeux sont baissés vers l'ombre dense en bas à droite. Le papier japon offre une tonalité chaude, rayonnante. La pose naturelle, sans affectation, l'expression nostalgique, les détails imprécis, le geste inachevé en font l'un des nus les plus captivants et les plus mystérieux de Rembrandt.
Le même modèle l'inspira, semble-t-il, pour La Femme au poêle qui est à demi-dévêtue. Une épreuve conservée à Washington porte une inscription au verso, « vour't Chirurg », qui indiquerait que Rembrandt offrit la gravure à la guilde des chirurgiens en remerciement de l'autorisation de dessiner le nu.
Bibliothèque nationale de France
Femme nue assise les pieds dans l'eau
État unique
L'éclairage qui vient de la droite, plus naturel que dans les autres figures de nus, est toujours utilisé pour donner du relief au corps, sculpture de lumière. La gravure est exécutée plus librement que dans les premiers nus, et avec beaucoup plus de maîtrise. Les tailles simples ou croisées sont espacées, soulignant largement les formes. Quelques points nuancent le modelé, notamment sur la jambe et le long du dos. Le visage de profil est dans l'ombre. Bien que des feuillages se distinguent dans le fond, le modèle assis sur un coussin posé sur une chaise pourrait être dans un intérieur.
Les effets obtenus par les tirages sur vélin ou sur japon avec ou sans un ton d'encrage sont très différents même s'il s'agit de la même planche. Le papier japon, moins absorbant que le « papier de Hollande », offre des nuances délicates. Ici, l'effet d'encrage limité au fond accentue la luminosité du corps nacré qui se détache sur des noirs somptueux. Le vélin, plus lisse que le papier japon, absorbe peu l'encre ; les contours sont imprécis, la lumière diffuse, l'ombre fondue, veloutée, surtout lorsqu'un effet d'encrage unifie l'ensemble. Le rendu, plus pictural que sur papier, évoque le lavis. Le corps se modèle à travers une clarté diaphane.
Bibliothèque nationale de France
La Femme devant le poêle
2e état
Des contre-tailles ombrent la poitrine et le côté droit de la femme modelés par des tailles simples au 1er état. La structure du fond où se joue la lumière est imprécise. Dès le 1er état, Rembrandt use de petits points pour parfaire le modelé, notamment au-dessus des seins et le long du bras gauche.
Pour la première fois, Rembrandt a situé la figure dans une pièce, en attachant de l'importance au lieu. Ainsi le poêle est-il représenté avec précision. Il est orné d'un médaillon représentant une femme en prière. Les structures de la pièce aux formes de plus en plus accentuées, écrasantes même, les contrastes d'ombre et de douce clarté, les zones de pénombre, mettent en valeur le buste lumineux de la femme éclairé d'une manière tout à fait artificielle. Le rayonnement qui baigne la scène de poésie dans les premiers états s'atténue ensuite, durcissant les formes qui environnent la femme, fragilisant d'autant la figure au buste nacré. Pour accentuer cet effet, Rembrandt supprime la coiffe blanche au sixième état et nuance par les valeurs de la chevelure le passage de l'obscurité de la niche au buste de plus en plus rayonnant.
C'est encore une recherche d'atmosphère qui préoccupe Rembrandt. Il vise à suggérer des sensations par l'ombre et la lumière, ici la lassitude croissante de la femme. Toujours dans la même position, elle ne continue pas à se dévêtir. Cet arrêt de l'action, ce temps qui s'écoule, l'artiste l'exprime par plusieurs états et par des effets rendus possibles par la gravure. À cette fin, il mêle les techniques pour modifier le fond, le jupon, et conserve l'eau-forte légère pour modeler délicatement le buste. Cette méthode complexe caractérise sa dernière manière.
Bibliothèque nationale de France
La Femme à la flèche
3e état
Au 2e état, des contre-tailles ont été ajoutées sur la joue gauche et sur l'espace compris entre le pied de la femme et la manche de sa chemise. L'ombre à gauche des pieds et au-dessus de la flèche a été obscurcie par de très fines hachures. Au 3e état, l'espace blanc triangulaire au-dessus et à droite de la date est ombré. La signature est reprise.
C'est la dernière estampe datée de Rembrandt. Son sujet a été diversement identifié. En 1751, Gersaint écrit dans son catalogue : « Elle est connue en Hollande sous le nom de la femme à la flèche » ; il ajoute que « c'est la plus rare de toutes ». Il évoque sans doute la liste des estampes de Rembrandt de la collection de Valerius Röver, amateur de Delft, dressée vers 1731. L'amateur J. Six y a vu « Vénus et l'Amour » ; l'historien Boon évoque une inspiration dont la source pourrait être une monnaie ou un bijou antique et suggère comme thème Antoine et Cléopâtre. Swarzenski rejette l'interprétation habituelle et précise que la femme ne tient pas une flèche mais le galon du rideau du lit.
L'estampe représente une jeune femme nue assise sur un lit vue de dos. La légère torsion du corps, l'orientation de son regard vers le visage masculin, sans doute modelé par des lueurs, dans l'ombre à gauche, l'accentuation des tailles en haut du dos, donnent à travers les différents états l'impression d'un mouvement. La lumière qui vient du haut dessine le nu jusqu'aux jambes, sans aucun contour pour la partie droite du corps. Un foisonnement de tailles ou de blanc concourt à diversifier les textures, et leur ensemble est d'une richesse de matière et de structure qui frise l'abstraction. Bien que traité différemment, c'est l'un des plus beaux nus de Rembrandt avec La Négresse couchée.
Bibliothèque nationale de France
L'Homme qui pisse
État unique
Cette estampe n'était, avec La Femme qui pisse, pas un exemple isolé dans l'art hollandais du 17e siècle ; elle se rangeait dans les facéties. Cependant l'audace des poses et la personnalité de leur auteur ont heurté longtemps les spectateurs, notamment au 19e siècle. Rovinski, auteur d'un catalogue raisonné des gravures de Rembrandt, qualifie La Femme qui pisse d'« horreur artistique ». Seul Charles Blanc évoque librement ces estampes. Ce qui dérange est la présence physique des personnages, leur réalisme provocateur. L'homme « lâchant de l'eau », selon Gersaint, se présente presque de face et exhibe son sexe debout, très naturellement, sans aucune gêne, et sans se soucier d'éventuels spectateurs. La femme semble plus mal à l'aise. Elle est accroupie et, pas très rassurée, regarde par-dessus son épaule si aucun observateur indésirable n'apparaît. Le véritable observateur est Rembrandt lui-même, qui saisit avec vivacité les instantanés de la vie quotidienne des vagabonds. Avant lui Callot, dans sa série des Capricci di varie Figure réalisée en 1617 et dédicacée à Laurent de Médicis, avait gravé un homme dans la même position que la femme mais pas du tout inquiet. C'est peut-être cette différence de comportement et de condition que Rembrandt a souhaité signifier.
Il semble, d'après le nombre de copies - sept sont connues -, que cette estampe ait été très recherchée. De mêmes dimensions ou légèrement réduites, elles sont de Claussin dans le même sens, et en contre-partie de Vliet, Denon (?), Vivares, Sardi et de graveurs anonymes.
Bibliothèque nationale de France
La Femme qui pisse
État unique
Cette estampe n'était, avec L'Homme qui pisse, pas un exemple isolé dans l'art hollandais du17e siècle ; elle se rangeait dans les facéties. Cependant l'audace des poses et la personnalité de leur auteur ont heurté longtemps les spectateurs, notamment au 19e siècle. Rovinski, auteur d'un catalogue raisonné des gravures de Rembrandt, qualifie La Femme qui pisse d'« horreur artistique ». Seul Charles Blanc évoque librement ces estampes. Ce qui dérange est la présence physique des personnages, leur réalisme provocateur. L'homme « lâchant de l'eau », selon Gersaint, se présente presque de face et exhibe son sexe debout, très naturellement, sans aucune gêne, et sans se soucier d'éventuels spectateurs. La femme semble plus mal à l'aise. Elle est accroupie et, pas très rassurée, regarde par-dessus son épaule si aucun observateur indésirable n'apparaît. Le véritable observateur est Rembrandt lui-même, qui saisit avec vivacité les instantanés de la vie quotidienne des vagabonds. Avant lui Callot, dans sa série des Capricci di varie Figure réalisée en 1617 et dédicacée à Laurent de Médicis, avait gravé un homme dans la même position que la femme mais pas du tout inquiet. C'est peut-être cette différence de comportement et de condition que Rembrandt a souhaité signifier.
Il semble, d'après le nombre de copies - sept sont connues -, que cette estampe ait été très recherchée. De mêmes dimensions ou légèrement réduites, elles sont de Claussin dans le même sens, et en contre-partie de Vliet, Denon (?), Vivares, Sardi et de graveurs anonymes.
Bibliothèque nationale de France
L'Espiègle
3e état
Cette scène bucolique où l'on voit une jeune fille et un berger au bord d'une rivière est très peu fréquente dans l'œuvre de Rembrandt. Les seules œuvres dont on puisse la rapprocher seraient de petites estampes telles que Le Vieillard endormi, Le Paysan et sa famille de 1644 et le Portrait de Saskia en Flora vêtue en bergère, connue aussi depuis le 18e siècle comme Le Miroir du hibou.
Tous les auteurs s'accordent à voir dans cette gravure le goût pour la poésie pastorale à la mode en Hollande à cette époque ; White signale que la réalisation de cette estampe correspond à l'arrivée chez Rembrandt d'Hendrickje Stoffels, venue s'occuper de son fils Titus et qui allait être l'amante du peintre jusqu'à sa mort. Cette estampe serait-elle la concrétisation du désir subconscient de l'artiste de fuir la réalité pour chercher refuge dans un paysage idyllique et une relation érotique-innocente ? Le plus probable semble qu'il ait simplement cherché, comme beaucoup d'autres graveurs, à éditer une estampe agréable à regarder et susceptible de se vendre, y ajoutant, selon son habitude, une touche personnelle : ainsi, au lieu de présenter des traits juvéniles et gracieux, le visage du berger est laid et vulgaire et, loin de contempler avec ravissement sa bien-aimée, il regarde à la dérobée entre ses jambes. Selon Holm Bevers, le hibou posé sur son épaule symbolise folie et luxure, donnant un côté inquiétant à la scène ; la flûte qu'il pointe vers la jupe de la jeune fille est un symbole phallique ; quant à la guirlande de fleurs, elle signifierait que la jeune fille consent à une relation sexuelle. On a toujours vu une allégorie sexuelle dans ces moutons et ces brebis qui, au lieu de paître paisiblement, s'affrontent et se pelotonnent. La tête que l'on aperçoit entre les branches de l'arbre demeure toujours un mystère car, n'étant pas tournée vers la scène, elle ne peut être celle d'un voyeur ni, semble-t-il, d'un faune. Peut-être faut-il y voir la trace d'une composition antérieure abandonnée par Rembrandt, mais qu'il aurait laissée sur cette estampe par jeu pur et simple.
Rembrandt effectua divers changements sur la planche - on les constate dans trois états successifs -, très rapprochés dans le temps (le papier utilisé pour les tirages est le même), cherchant avant tout à différencier le chapeau de la jeune fille de la masse arborée du fond. Au 4e état, il élimina une tête masculine qui se penchait entre les arbres et dont on ne comprend pas le rôle dans la scène ; il corrigea également le défaut du bas de la planche, à droite, et il simplifia la végétation sur la gauche, sans doute pour ne pas distraire l'attention du spectateur des deux figures principales.
Biblioteca Nacional de Madrid
Le Lit à la française ou « Ledikant »
4e état
Le cuivre qui mesurait 150 x 224 mm au 1er état a été réduit au 2e état et ne mesure plus que 125 x 224 mm. Au 3e état, les tailles sur la manche droite ont été effacées au brunissoir et dessinées à nouveau. Au 4e état, le tapis de la petite table à la tête du lit est ombré de diagonales.
Gersaint écrit : « Un sujet libre, appellé en Hollande Ledikant, ce qui veut dire le Lit à la Françoise. En effet, on y voit un lit dans la forme de ceux que nous nommons lits en tombeau. » Plus loin, évoquant la suppression de la signature, il qualifie le sujet d'"indécent" et pense que "le remords causé par une réflexion trop tardive" a incité Rembrandt à réduire le cuivre pour le rendre anonyme. Déjà au 18e siècle, la gravure était devenue rare.
Ces sujets étaient très prisés par les artistes hollandais de l'époque et de nombreuses gravures les représentant provenaient d'Italie. Rembrandt possédait dans sa collection d'estampes un album de pièces érotiques de Raphaël, Rosso, Carracci et Bonasone. Les séries les plus connues étaient les « Postures » ou Modi (1524) de Marcantonio Raimondi et les Lascivie (ca 1590-1595) d'Agostino Carrachi. Mais toutes ces estampes qui mettent en scène des dieux, des nymphes et des satyres sont éloignées de la représentation très réaliste qu'en fit Rembrandt. En effet, les personnages sont vêtus et non pas nus comme les héros et les dieux des estampes italiennes. Peut-être sont-ils cependant plus choquants à l'époque pour le public parce qu'il n'y a pas transposition de la réalité et qu'il s'agit d'une scène galante contemporaine. De plus, Rembrandt, souhaitant sans doute suggérer les variations de mouvements, a modifié la position de la femme en négligeant volontairement d'effacer un bras gravé antérieurement et nettement visible. Il jugeait ce geste décomposé plus suggestif qu'un autre état. Selon certains catalographes, il y aurait même quatre bras. D'autres rectifications moins significatives ont été apportées aussi sur la jambe gauche.
Par un jeu d'ombre et de lumière, mêlant les trois techniques, l'artiste privilégie l'intimité du couple qu'il dévoile au spectateur. Les lourds rideaux sombres sont largement ouverts vers l'extérieur et le lit baigné d'une douce lumière atténuée par des tailles de pointe sèche. La couche moelleuse, les coussins, la coiffe à plume de l'homme posée sur un montant du lit enveloppent le couple d'une grande sensualité. Une expression de satisfaction est nettement visible sur le visage de la femme. Le reste de la pièce, dans la pénombre, est vide. Seule une petite table, près du lit, sur laquelle un verre est posé évoque les prémices de cette rencontre. En réduisant l'espace au 5e état, Rembrandt accentue l'intimité et la sensualité de la scène. Il concentre l'attention sur le couple enveloppé par un jeu d'étoffes moelleuses et souples
Bibliothèque nationale de France
Bilbiothèque nationale de France